La boucle est bouclée : un bébé nommé en hommage à son oncle juif qui fut enterré selon le rite musulman
19/06/2023Abdul est né et a grandi dans la diaspora bédouine. Sa mère, Rina, était juive et son père arabe. Sa mère, qui était très jeune au moment de sa naissance, a été victime de violences graves et continues de la part de son mari, tant et si bien qu’elle a décidé de s’enfuir, laissant derrière elle Abdul, 11 ans, et son frère Mussa, 10 ans.
Le père d’Abdul n’était pas disposé à laisser partir sa femme. Quelques mois après son départ, il a demandé à une jeune femme de son clan de prendre contact avec Rina et d’inventer un stratagème pour l’attirer à Rahat, une ville à proximité de chez lui. La jeune femme a prétexté vouloir lui rembourser plusieurs centaines de shekels qu’elle lui avait emprunté des années plus tôt.
Ayant désespérément besoin d’argent, Rina a sauté sur l’occasion et s’est rendue à Rahat, la capitale bédouine du Néguev. Cependant, alors qu’elle marchait de la gare routière vers le lieu de rendez-vous, elle a été renversée par une voiture roulant à grande vitesse. Le conducteur, non content de la heurter une fois, a fait demi-tour et l’a fauchée à nouveau, avant de disparaître dans l’obscurité.
L’incident s’est produit il y a 15 ans et les caméras de sécurité étant alors rares dans cette partie du pays, la police n’a pas été en mesure de résoudre le crime. Le chauffard n’a jamais été arrêté.
Pendant ce temps, Abdul et Mussa, prénommés David et Moshe par leur mère juive, étaient cruellement maltraités par leur père et les membres de son clan. Leur père appartenait à une famille de criminels bien connus et n’accordait pas beaucoup de valeur à la vie des autres. Le fait que les garçons soient communément surnommés » les fils de la juive » n’a fait qu’empirer les choses.
Trois ans plus tard, David-Abdul et Moshe-Mussa décidèrent de s’enfuir. Ils s’installèrent à Tel-Aviv et devinrent ce que l’on appelle des gamins des rues. A un moment donné, ils trouvèrent refuge dans un foyer géré par les services sociaux mais malheureusement, ils se retrouvèrent de nouveau très vite à la rue.
C’est alors qu’une tragédie les frappa de plein fouet. Une nuit, au plus fort d’une bagarre, Moshe-Mussa fut poignardé par un autre gamin des rues. David-Abdul se retrouva tout seul, et comme si cela ne suffisait pas, leur père se battit férocement pour que son fils soit enterré selon le rite musulman.
David continua à vivre en alternance dans la rue et dans des foyers d’accueil qui lui offraient un abri quand il faisait trop froid, jusqu’à ce qu’une rencontre avec un hassid de Chabad change sa vie. David fut abordé dans la rue par un homme qui proposait aux passants de mettre des téfilines. David ne savait pas de quoi il s’agissait mais il accepta.
Ils commencèrent à discuter et David dévoila l’histoire de sa vie au jeune homme qui l’écouta bouche bée. » Si ta mère est juive, tu es juif toi aussi ! » lui révéla ce dernier avec enthousiasme. Plus tard, il appela l’organisme Yad Lea’him pour transmettre les coordonnées de David. Un employé de l’organisme s’empressa de le contacter.
La rencontre avec les hommes de Yad Lea’him changea sa vie du tout au tout. Après avoir vérifié son identité, les membres de l’organisme s’arrangèrent pour lui trouver un appartement bien équipé et propre qu’ils louèrent et meublèrent pour lui. Dans le cadre du projet de tutorat de l’organisme, il commença à étudier des sujets de base du judaïsme deux fois par semaine avec un professeur particulier. Parallèlement, Yad Lea’him s’occupa de lui trouver un emploi régulier et l’aida à emprunter un nouveau chemin de vie.
Grâce à Yad Lea’him, il a rencontré sa future femme et l’organisme l’a beaucoup aidé dans les préparatifs du mariage. Cette semaine, un événement particulièrement émouvant s’est déroulé. David est devenu père et lors de la cérémonie de Brit Mila organisée avec l’aide de Yad Lea’him et du mohel Yossef Yits’hak, il a nommé son fils aîné Moshe, du nom de son jeune frère assassiné.
Le Rav Yoav-Zeev Robinson, qui accompagne David depuis plusieurs années et lui sert de figure paternelle, était à ses côtés durant la Brit Mila. » David et moi avons fondu en larmes lorsqu’il a nommé son fils aîné comme son frère « , raconte-t-il. Lorsqu’il est parvenu à retrouver son calme, David m’a confié : » J’élèverai le petit Moshe comme un vrai Juif, pas comme mon frère qui a été élevé et enterré comme un musulman. Ce Moshé sera notre consolation et perpétuera la chaîne des générations de notre mère, rompue au moment de son décès. »